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Chronique N°5

Un monde plus sûr... plus heureux

Certains de nos brillants esprits scientifiques cherchent à tout prix à améliorer notre qualité de vie, et nombre d’esprits crédules célèbrent déjà les progrès accomplis. Certes, notre vie est plus confortable qu’elle ne l’a jamais été, mais peut-être serait-il temps d’arrêter certains ” progrès ” et de revenir en arrière avant qu’il ne soit trop tard.
L’homme imparfait, créé par la nature, va être ” amélioré ”, pour son plus grand profit, par nos apprentis sorciers qui espèrent transformer ce mutant en ” homme bionique ” ou ” cyborg ”. Les premières prothèses étaient physiques et souvent utiles, mais elles deviennent à présent des extensions du cerveau. Les prothèses numériques vont mettre de nouveaux outils dans les mains de l’homme, et dans quelque temps, l’ordinateur sera muni d’un système de reconnaissance de la pensée par une simple puce électronique. ” L’homme du futur évolue par extériorisation de fonctions sous forme de prothèses qui s’interconnectent ” a dit un jour Joeuml;l de Rosnay. Nous aurions préféré que son évolution soit plus personnelle et plus spirituelle. Cet homme qu’on nous promet pour demain, stérilisé, greffé, constitué de pièces détachées, transformé grâce à des puces électroniques qui lui permettront d’intégrer l’intelligence artificielle, va-t-il rester longtemps un être humain, avec ses propres pensées, ses propres choix ?
Tout cela nous incite à regretter ” le bon vieux temps ”, le temps où nous mangions une nourriture saine et savoureuse à la fois, ou les enfants ne s’ennuyaient jamais, n’étaient que très rarement malades, étaient prudents et non-violents, et auraient éclaté de rire à la simple idée d’aller voir un psychopédagogue. Le temps où les enfants ne servaient pas de cobayes à l’industrie pharmaceutiques comme les 49 bébés décédés en Inde depuis 2006 lors de tests cliniques de médicaments, sans compter ceux qui ont subi un sort semblable en d’autres lieux de la planète, y compris dans des pays qui se prétendent civilisés.
Un temps où les adultes n’avaient pas davantage besoin de fréquenter un psychiatre, n’étaient pas déprimés, connaissaient leur médecin qui les connaissait encore mieux, et leur parlait, au lieu de converser avec leur ordinateur sur les maladies et non les malades.
C’est ce temps de la joie de vivre que nous avons échangé contre un stress généralisé, une angoisse effrayante, la perte de nos valeurs, peut-être de notre âme.
Nombre d’entre nous sont dupes de ce ” progrès ”, de cette ” amélioration ” de notre vie quotidienne et pratiquent la politique de l’autruche au sujet de l’avenir de l’homme, inconscients des terribles dangers que font courir à l’humanité tous les trafics pratiqués par une intelligentsia scientifique qui navigue entre les intérêts économiques et l’apprentissage de la sorcellerie. En cas de malheur, nanti de l’absolution générale, d’éminents professeurs nous expliqueront avec des trémolos dans la voix que les décisions incriminées étaient justifiées par les ” données actuelles de la science ”, d’autant qu’à présent, à la notion de ” responsable mais pas coupable ” s’est ajoutée celle de ” coupable mais pas condamnable ”.
Ceux qui ” pensent ” pour nous doivent savoir ce qu’ils font, a-t-on tendance à croire. C’est là notre plus grande erreur. Ceux qui prétendent ” penser ” et ceux qui nous dirigent - qui ne pensent pas davantage sur le long terme - vivent en vase clos, loin des plaisirs simples et de la ” vraie vie ”. C’est cette vie-là que nous devrions retrouver, au risque de perdre notre personnalité et même notre âme.

Sylvie SIMON

 

 

(Tous droits réservés ©  AUTOMNE 2008)

 

 

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